La fatalité s’est exercée sur le cinéma d’animation de l’époque du premier franquisme : une activité industrielle très limitée, l’absence de moyens financiers, un marché trop restreint constituaient un sérieux handicap. De plus, un discours déjà contraint (autocensure oblige) se trouva condamné ensuite par la confidentialité de la distribution, la fragilité du support et la redoutable concurrence du génie de Walt Disney. Ce cinéma eut cependant le mérite d’exister et l’étude de ce corpus réduit permet d’appréhender un moment historique qui a joué un rôle déterminant dans la production artistique espagnole. Les trois films en question sont Garbancito de la Mancha (sorti sur les écrans en 1945, il est le premier dessin animé de long métrage en couleurs, non seulement espagnol mais encore européen), Alegres vacaciones (Joyeuses vacances, 1948) et Erase una vez (Il était une fois, 1950). Par nombre de séquences d’une fraîcheur intacte, ces films subvertissent en partie l’inactualité de l’univers social et idéologique dans laquelle ils sont ancrés. La pluralité des formes de décryptage (idéologique, psychanalytique, narratologique, esthétique) s’attache à mettre en valeur les différents niveaux sémantiques des œuvres du corpus.